mardi 30 août 2016

Ecrit-on pour les autres ou pour soi? La vieille question est drôle. Quand j'écris, j'ai l'impression que cent mille personnes – qui me veulent tout le bien et tout le mal du monde – épient par-dessus mon épaule, dictent, évaluent, commentent, insinuent, tirent mes cheveux, se chamaillent, hurlent et se taisent d'un coup, braillent à nouveau, piétinent, soupirent, menacent, m'embrassent, me piquent, m'arrachent la chaise, me rassoient, me cajolent, avancent leurs museaux et me mordent au sang : et ces odieux vampires chahuteurs, ces démons, cette foule tyrannique pour laquelle je travaille, terrifié, adulé, saccagé, c'est moi seul.


Abécédaire malveillant, 1989

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