jeudi 21 février 2019

Dans la langue française, le mot encens est relativement tardif : il a été emprunté vers 1135 au latin ecclésiastique incensum, désignant une matière brûlée en sacrifice (participe passé neutre du verbe incendere = brûler, enflammer) . Chez les Romains on l'appelait thymiama, un mot proche de thym, à rattacher à deux racines grecques : l'une, thuos évoque à la fois l'idée d'offrande et de parfum, d'aromate ; l'autre, thuien, correspond à la notion de sacrifice (que l'on fait brûler). À l'origine, sans doute une racine indo-européenne °dhu- (= faire brûler).

Les termes ci-dessus montrent bien l'importance de l'encens dans la religion, les dieux étant apparemment friands de ses fumées qui montaient vers eux en sacrifice. Le dieu assyrien Baal en était un grand consommateur, mais L'Eternel, dans l'Ancien Testament, aimait également beaucoup l'encens, mentionné à 113 reprises dans les divers livres[réf. nécessaire]. On notera surtout un passage de l'Exode (XXX: 34-37) dans lequel L'Eternel précise à Moïse la composition du mélange qu'il faut faire brûler pour lui (styrax, onyx, galbanum, aromates et pur encens), tout en lui indiquant que ce mélange ne doit pas être utilisé de façon profane :

« " Le parfum que tu fais là, vous n'en ferez pas pour vous-mêmes de même composition. Il sera saint pour toi, réservé à L'Eternel. Quiconque fera le même pour en humer l'odeur sera retranché de son peuple." »

Les Égyptiens, considérés comme les plus grands parfumeurs de l'Antiquité, firent eux aussi un grand usage de l'encens, qui entrait notamment dans la composition du kyphi. Le nom même de l'encens dans l'ancienne langue égyptienne est évocateur. Le mot "netcher" désignait ce qui relevait des dieux ou du divin et c'est le causatif de ce mot qui était utilisé pour dénommer l'encens : "sénetecher" dont une traduction pourrait être : "Ce qui rend divin". Même chose chez les Grecs et les Romains[réf. nécessaire]. La nature divine de l'encens est évoquée par Ovide dans ses Métamorphoses, puisque selon lui le premier arbre à encens aurait poussé sur la tombe de Leucothoé, maîtresse d'Hélios châtiée par son père Orchamos.

Le christianisme, dans la continuité de l'Ancien Testament, perpétue l'utilisation de l'encens, de plus il fait partie des cadeaux apportés au Christ par les mages. L'encens est brûlé dans un encensoir, qui est balancé selon l'usage propre à chacun des rites respectifs pour mieux en diffuser dans l'air le parfum . La fumée de l'encens montant vers le ciel symbolise également la prière qui monte vers Dieu.

De tous les parfums, l'encens est certainement celui qui a le passé le plus prestigieux. On le considérait dans l'Antiquité comme plus précieux que l'or, et la route de l'encens a fait la fortune de plusieurs royaumes arabes.

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La route de l'encens liait autrefois l'Égypte au Yémen et à l'Inde. Elle fut probablement créée aux environs de 1800 av. J.-C., quand les Indiens commencèrent à envoyer de l'encens aux ports d'Arabie et d'Égypte : Cane, Aden et Muza dans le sud et Bérénice, Philotera, Myos Hormos, Leuce Kome et Aila dans le nord. L'encens qui arrivait aux ports d'Arabie était ensuite envoyé par caravane dans le désert jusqu’à Pétra, et de là, à Gaza et à Damas. Celui transitant par les ports d'Égypte était transporté à Alexandrie, en passant par Coptos.

Le commerce de l'encens, et de la myrrhe, d'Arabie du Sud vers la Méditerranée, a prospéré entre le iiie siècle avant notre ère et le iie siècle de notre ère. La route de l'encens a servi de canal pour des échanges de biens autres que l'encens ou la myrrhe : épices indiennes, ébène, soie, textiles de qualité. D'Afrique orientale ont circulé également bois rares, plumes, peaux d'animaux, or, (et esclaves).

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